Technologie

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Echangeurs thermiques : la juste flexibilité

Sun Jan 8, 2012

Le traitement thermique est une étape clé des procédés alimentaires. Cuisson, pasteurisation ou stérilisation sont ainsi utilisées pour garantir la conservation des produits. Mais ces opérations modifient aussi les caractéristiques des aliments (texture, couleur, composition nutritionnelle...) et doivent être menées avec précaution. Le consommateur demande en effet des produits sains et sûrs, mais aussi présentant des qualités gustatives proches de celles des aliments frais.

Les échangeurs thermiques doivent donc répondre à de multiples critères : garantir le barème de traitement, préserver les qualités des produits, être facilement nettoyables, présenter un bon rendement énergétique. Ces exigences nécessitent une adaptation parfaite des traitements thermiques aux caractéristiques des produits.

Les échangeurs électriques présentent cette souplesse et autorisent des fonctionnements en stop and go. De plus, ils sont simples à utiliser, d’une grande fiabilité et ils garantissent la reproductibilité des traitements.

Exemple avec quelques-uns des équipements les plus novateurs dans les deux grands domaines technologiques que sont les échangeurs tubulaires et les échangeurs à plaques.

Les échangeurs tubulaires

Les échangeurs tubulaires classiques sont couramment utilisés pour le traitement des produits de viscosité moyenne ou comportant des morceaux immergés dans un liquide. La plupart de ces équipements sont constitués de tubes concentriques dans lesquels circulent, sans contact direct, la matière à chauffer et le vecteur de chaleur, eau ou vapeur.

Dans les années 80, un programme de recherche mené à EDF a permis de mettre au point un autre type de matériel privilégiant le transfert direct : le tube à passage de courant. Le TPC facilite les échanges thermiques et permet une adaptation plus fine du traitement en fonction du produit (voir encadré). C’est sur son principe que sont basés les équipements proposés par des fabricants comme Actini ou Rossi Catelli.

Actini : un TPC tubulaire

Depuis son lancement en 1991, l’Actijoule a été installé dans une soixantaine de sites agroalimentaires. Il est composé d’un ensemble de tubes dans lesquels circule le produit. La régulation est assurée par un automate qui agit par l’intermédiaire d’un régulateur PID sur un jeu de thyristors de puissance. On obtient ainsi des précisions de température de 0,2 °C. Enfin, un disque enregistreur permet de consigner les températures de traitement et de sortie du produit, garantissant ainsi une parfaite reproductibilité des paramètres de pasteurisation et la traçabilité des productions.

Selon les produits à traiter, Actini a conçu (avec l’aide de ses partenaires : EDF, Anvar et Inra de Villeneuve d’Ascq) différents modèles de tubes à géométrie variable afin d’optimiser les transferts thermiques. Pour les liquides ou les produits peu visqueux, on utilise de simples tubes cylindriques. Les produits visqueux mais homogènes, comme la moutarde ou le ketchup, nécessitent des tubes trilobes ou quadrilobes. Cette forme particulière permet de supprimer la veine froide et ainsi d’ obtenir un profil de température très homogène au sein de produits visqueux à écoulement laminaire. Quant aux produits avec des morceaux ou ayant une viscosité moyenne, ils sont cuits ou pasteurisés dans des tubes bosselés qui génèrent une turbulence garantissant un meilleur échange thermique. L’Actijoule est utilisé pour le traitement thermique (pasteurisation ou cuisson) de nombreux produits : jus de fruits, lait, chocolat, confiture, sauces...

Échangeurs a plaques

Les échangeurs à plaques sont utilisés depuis longtemps pour le traitement thermique de liquides de faible viscosité comme le lait ou la bière. Classiquement, ils sont constitués d’un empilement de plaques conjuguées qui forme des canaux dans lesquels circulent les fluides chauds et froids. L’échange de chaleur est donc basé sur le principe d’un échange de chaleur entre ces deux fluides par l’intermédiaire d’une plaque.

Les échangeurs à plaques présentent l’immense avantage d’être compacts tout en offrant une importante surface d’échange. Les dernières innovations sur ce type de matériel concernent en particulier l’amélioration de la compacité et de la flexibilité des installations de petites capacités.

Vicarb : un nouveau concept de plaques électriques

En 1994, Vicarb a développé, avec l’aide d’EDF-DER, un échangeur à plaques électriques baptisé Platelec dans lequel le fluide caloporteur est remplacé par une plaque électrique. Le chauffage ne s’effectue donc plus via une boucle d’eau chaude intermédiaire mais par contact direct sur ces blocs chauffants. Ceux-ci sont constitués de résistances électriques noyées dans des blocs d’aluminium, le tout étant revêtu d’une couche à caractéristique inoxydable ou de PTFE (Poly Tetra Fluoro Ethylène) dans le cas du chauffage de produits alimentaires. Les éléments Platelec reprennent la forme et les ondulations des plaques standards et peuvent donc être incorporés facilement dans un échangeur conventionnel.

Les avantages de ce système sont nombreux : il s’agit d’un procédé de chauffage décentralisé, son rendement électrique-thermique est proche de 100%. Il permet également une régulation fine et un écart de température réduit entre le fluide à chauffer et la paroi du bloc chauffant. Les applications du Platelec sont multiples : chauffage d’eau, thermo-régulation, production de vapeur, pasteurisation ou stérilisation de liquides alimentaires.

Une chaudière ultracompacte

L’empilement de plusieurs Platelec entre deux plaques standards permet de constituer une chaudière pour la production d’eau chaude ou de vapeur. Dans le cas d’un chauffage direct, l’eau circule et se réchauffe dans les canaux entre chaque bloc. Elle peut être utilisée directement dans le process ou être stockée dans des ballons.

La configuration chaudière peut également correspondre à un chauffage indirect décentralisé : l’eau chaude (ou la vapeur) sert alors à alimenter un échangeur classique situé à proximité afin d’effectuer une pasteurisation ou une stérilisation indirecte. D’autres applications existent également comme le dégivrage de chambres froides.

Dans le cas d’une production de vapeur, la vaporisation s’effectue dans une chambre de détente cylindrique située au dessus de l’échangeur (voir schéma). Les générateurs de puissance de 300 kW peuvent produire jusqu’à 400 kg par heure de vapeur d’eau à 140°C sous 4 Bar. Ces systèmes présentent plusieurs avantages. D’abord, l’utilisation de blocs chauffants permet d’avoir un très faible volume d’eau (moins de 15 litres) sous pression. On peut ainsi éviter des contrôles réglementaires contraignants (passage aux Mines) et la construction d’un local de chaufferie spécial.

D’autre part, les coûts d’entretien sont réduits. Enfin, ces chaudières, très compactes, peuvent être installées à proximité des utilisations (humidification dans les fours de cuisson, injection de vapeur dans les chambres de pousse...), ce qui réduit les pertes thermiques sur les tuyauteries de liaison.

Thermo-régulation : refroidir et chauffer sur un même échangeur

Le thermorégulateur est également composé d’un empilement de plaques standards et de plaques électriques. Mais dans cette configuration, la section d’assemblage est constituée successivement d’une plaque électrique, d’un canal pour le fluide caloporteur, d’un canal pour le fluide réfrigérant. On peut donc refroidir et réchauffer un fluide sur un même échangeur, là où deux unités séparées étaient nécessaires. Plusieurs applications industrielles existent, notamment pour le réchauffage et le refroidissement de cuves double enveloppe utilisées pour la cuisson de produits comme la confiture.

Pasteurisation-stérilisation de liquides alimentaires

Pour les petites capacités, Vicarb a développé en partenariat avec la société TechniProcess un pasteurisateur monobloc vertical (UPE) intégrant un système de chauffage et de refroidissement. Le liquide à traiter circule directement au travers des sections de chauffe constituées de plaques électriques Platelec revêtues d’inox. Cette configuration autorise une différence de température très faible entre le liquide à pasteuriser et les parois des plaques (1°C).

Dans sa version compacte, l’échangeur est constitué de quatre sections : préchauffage, récupération, chauffage final et refroidissement (voir schéma). Cette centrale froid est composée de blocs dans lesquels ont été noyés des serpentins permettant d’évaporer un gaz frigorigène. Un groupe de condensation à air placé en partie basse complète le système. Les blocs seront ainsi amenés à une température voisine de 0 à 1°C. Et le produit passant à son tour sur ces blocs sera réfrigéré jusqu’à 5 à 6°C.

Ce pasteurisateur présente plusieurs avantages. Tout d’abord, il est extrêmement simple : il n’y a plus qu’une seule boucle de régulation, le circuit eau chaude ou vapeur et chaudière étant supprimé. Une prise électrique suffit à le faire fonctionner ! Deuxième point fort : l’écart de température entre le produit et la paroi de la résistance est faible et parfaitement maîtrisé. Comme tous les systèmes électriques, l’inertie est réduite donc la précision du barème de pasteurisation est plus importante. Enfin, ce pasteurisateur qui fonctionne pour des capacités allant de 100 à 1000 l/h, est très compact, et facilement démontable pour le nettoyage.

Il présente cependant quelques limites : sa capacité maximale est de 1000 l/h en chauffage direct et son utilisation est réservée aux fluides faiblement visqueux sans particule. Notons que pour des capacités supérieures à 500 l/h, on peut envisager un fonctionnement en semidirect, permettant d’augmenter la taille des plaques électriques. Dans ce cas, la section d’assemblage est constitué successivement d’une plaque électrique, d’un canal pour de l’eau statique, d’une plaque classique en inox et d’un canal pour le liquide à pasteuriser.

Le pasteurisateur / stérilisateur Platelec répond aux besoins des unités de transformation de petites capacités. Il est également parfaitement adapté dans les pays où existent des problèmes d’approvisionnement et de qualité d’eau. Plusieurs installations ont déjà été réalisées en France par exemple chez Modema à Cholet pour la pasteurisation du lait (500 l/h), et testés sur différents fluides : chicorée, arômes, mix de crème glacée, jus de fruit, lait chargé en crème. Au Maroc, à Madagascar, en Roumanie ou en Algérie, le pasteurisateur Platelec est surtout utilisé pour la pasteurisation du lait à la ferme. D’autres développements industriels sont également prévus.